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Pour une culture partagée
de l’intégrité scientifique

N° 4

À LA UNE

Science ouverte, intégrité scientifique : les enjeux en 2023  

La science ouverte ne cesse de progresser en France : le taux d’accès libre des publications française était de 62 % en 2021 et devrait encore gagner des points dans les résultats du baromètre 2022 à venir. Surtout, plus nouveau encore, la part des articles publiés qui donnent également accès aux données de recherche augmente elle aussi.

Un mouvement qui va dans le sens d’un environnement de recherche plus favorable au respect des bonnes pratiques, selon Nicolas Fressengeas, vice-président en charge du numérique,  des données et de la science ouverte à l’Université de Lorraine.

Il nous livre sa vision des enjeux liés à l’intégrité scientifique. Il réagit également à l’explosion des coûts pour les auteurs, dus à certains modèles de publication en accès libre. Une première estimation en France évalue en effet à 30,1 millions d’euros cette dépense en 2020, soit trois fois plus qu’en 2013.

LA RECHERCHE SUR LA RECHERCHE

L’autorat inapproprié, en tête des pratiques questionnables

Inédite par le nombre de personnes sondées, 45 000 en Europe et 2 300 aux États-Unis, l’étude menée dans le cadre de l’enquête internationale sur l’intégrité de la recherche  (International Research Integrity Survey) enfonce le clou : quand on interroge les chercheuses et chercheurs sur les pratiques douteuses de recherche autour d’eux, les problèmes liés à la signature des publications arrivent en tête. D’autres enquêtes l’avaient déjà montré, mais ici ce sont près de 70 % des chercheurs européens qui le déclarent. Ils affirment avoir publié, au cours des trois dernières années, des articles dont certains auteurs, n’ayant pas suffisamment contribuer au travail, ne méritaient pas de l’être.  Dans la liste de ces pratiques douteuses, suivent ensuite l’examen par les pairs insuffisant et la supervision inadéquate des jeunes chercheurs.

Chez les scientifiques américains, l’autorat inapproprié est également la pratique questionnable la plus répandue, mais seulement pour 55% d’entre eux.  Une nette différence d’appréciation entre Etats-Unis et Europe que ne manque pas de souligner l’article de Nature qui cite l’étude, dont les résultats ne sont encore que sous forme de preprint.

Une autre étude publiée dans PLOS ONE s’est focalisée sur la façon dont les jeunes chercheurs appréhendent ce problème. Elle  a recueilli les témoignages de 1 336 doctorants de cinq pays européens (Danemark, Hongrie, Irlande, Portugal et Suisse) et de disciplines différentes :  environ trois sur dix ont déclaré avoir accordé au moins un statut d’auteur invité à « une personne influente ». La moitié d’entre eux disent l’avoir fait à la demande d’une personne qu’ils considéraient en situation de pouvoir.  Ces pratiques touchent particulièrement les chercheurs en début de carrière, dans les sciences naturelles, techniques et médicales.

VU D’AILLEURS

L’Inde diminue la pression à la publication sur les doctorants

Comment lutter contre les revues prédatrices peu soucieuses de la qualité de la recherche ?  Très touchée par le phénomène, l’Inde tente une nouvelle stratégie pour l’endiguer. Ayant constaté que l’obligation de publier durant la thèse poussait les doctorants vers ces revues, The University Grant commision qui définit les règles d’enseignement, d’examen et de recherche des universités indiennes, a décidé de la supprimer.

L’article stipulant la nécessité de publier au moins un article de recherche dans une revue à examen par les pairs et de faire deux présentations dans des conférences avant la soutenance de thèse, qui prévalait depuis 2016, a donc disparu des nouvelles règles en vigueur depuis novembre 2022. Une mesure dont il sera intéressant de suivre l’impact.

L’obligation de suivre un cours sur l’éthique de la recherche durant le doctorat pour l’obtention du diplôme, figure quant à elle toujours bien dans ces règles, comme en France.

Recherche responsable au Québec : les FRQ réaffirment leur politique

Acteurs clé du financement public de la recherche au Québec, les Fonds de recherche du Québec (FRQ) ont mis à jour leur politique sur la conduite responsable en recherche élaborée en 2014. On retrouve dans cette nouvelle mouture une description des pratiques exemplaires qu’ils promeuvent.  Ils y réaffirment que le respect des valeurs qui sous-tendent cette conduite responsable est  « une condition essentielle de financement public à des activités de recherche ».

Le texte définit aussi explicitement les manquements à la conduite responsable dont les écarts à l’intégrité scientifique. Il précise le processus de prise de décisions des FRQ face à des cas avérés de manquements. Entre autres, celles de « cesser, suspendre, demander le remboursement du financement, ou rendre inadmissible une personne à la détention d’un octroi par les Fonds pour une période déterminée », ou encore celle de « retirer la reconnaissance FRQ à un établissement ou à une infrastructure ». Ces décisions s’appuient sur les rapports d’instruction réalisés et communiqués par les établissements, les FRQ ne menant pas eux-mêmes d’instruction en cas d’allégation de manquements à l’intégrité scientifique.

EN CHIFFRES

12,5 %

En 2002, deux affaires retentissantes de fraude dans des laboratoires très prestigieux ébranlèrent la communauté des physiciens. Victor Ninov au Lawrence Berkeley National Laboratory et Jan Hendrik Schön au Lucent Bell Labs, promis à de belles carrières, avaient tous deux fabriqué leurs données. La société américaine de Physique (ASP) s’était alors inquiétée de la sensibilisation aux questions d’éthique dans sa discipline. Et avait mené une enquête auprès de ces membres en 2003. 17 ans plus tard, pour mesurer le chemin parcouru, l’ASP a soumis le questionnaire à des jeunes physiciens et physiciennes et en publie une synthèse dans Physics Today.

Résultat, ils sont plus de 3 fois plus nombreux à connaître le code de bonne conduite de leur établissement. Mais force est de constater que cela ne suffit pas à faire changer les comportements : les manquements restent pour la plupart aussi répandus. De plus, 12,5 % des jeunes chercheurs déclarent avoir ressenti des pressions pour contrevenir aux bonnes pratiques, contre 7,7 % en 2003.

Autre motif de préoccupation, et c’est une nouveauté de l’enquête de 2020 qui comprenait aussi des questions sur les mauvais traitements et le harcèlement, la proportion de femmes déclarant avoir été harcelées physiquement : elle atteint 8,3 %. La plupart de ces jeunes femmes n’ont fait aucun signalement auprès de leur institution. Les auteurs de l’enquête alertent donc sur le besoin de dispositifs institutionnels capables de mieux gérer ce type de problèmes.

INITIATIVE

Pour un traitement journalistique rigoureux de la science

« Le traitement de l’information scientifique exige une attention spécifique  en matière de déontologie », peut-on lire en avant-propos de la recommandation adoptée par le Conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM). Covid-19, réchauffement climatique, intelligence artificielle sont autant de sujets qui rappellent en effet la nécessité d’une approche journalistique rigoureuse, respectueuse de la démarche scientifique.

Préparée par un groupe de travail au sein du CDJM, cette recommandation tient en 34 règles élémentaires à suivre pour un journaliste traitant de questions scientifiques. Un complément utile aux réflexions sur les bonnes pratiques à observer par les scientifiques lors de prises de parole publiques (voir le colloque 2022 de l’Ofis) et des chartes que certains établissements ont publiées.

RESSOURCES PRATIQUES

Boite à outils pour la promotion de l’intégrité scientifique

Après quatre ans de travail, la version achevée de la Toolbox du projet européen SOPs4RI est en ligne. L’objectif était d’inventorier et de mettre à disposition des organismes de recherche et des agences de financement tous les outils – procédures standards, guides de bonnes pratiques, conseils et exemples etc. – sur lesquels s’appuyer pour développer leur propre politique de promotion de l’intégrité scientifique.

Environ 150 ressources sont désormais accessibles. Elles sont plus nombreuses en direction des organismes de recherche : 121 classées suivant 9 thèmes (environnement de recherche, supervision et mentorat, gestion de données, déclarations d’intérêt etc.). Les outils qui ciblent les agences de financement sont répartis entre ceux dédiés aux relations avec les opérateurs de recherche et ceux plutôt liés aux procédures internes des agences.

NOMINATIONS

Les nouveaux référents et nouvelles référentes à l’intégrité scientifique nommées en France

Novembre 2022 : Elisabeth Guilhamon, Université Bordeaux Montaigne ; William Marois, Université d’Orléans ; Vivien Prigent, Ecole française de Rome

Décembre 2022 : Philippe Beaune, Université Paris-Cité ; Christian Andres et François Brunet, Université de Tours

Janvier 2023 : Benoit Humblot, EPF Ecole d’ingénieurs

Et sur le nouveau site de l’Ofis, l’annuaire des référents et référentes à l’intégrité scientifique (RIS) a fait peau neuve !  Vous y trouvez facilement le RIS de chaque établissement.

AGENDA

17 novembre 2022  / 13h30-17h 

Research Conduct and Integrity – the Challenges for the Doctoral Journey

Face aux enjeux et exigences du métier de chercheur aujourd’hui : comment aider les encadrants, les doctorants et les post-docs à comprendre les risques, éviter les chausse-trappes et adopter les bonnes pratiques ?  Comment rendre ce métier attractif ? La 5e conférence annuelle Pride (Association for professionals in doctoral education) qui se tiendra à l’université de Porto, au Portugal, proposera des pistes de réponses à ces questions.

ACCES LIBRE

Les documents de l’Ofis à disposition

Toutes les productions de l’Ofis (outils d’accompagnement, enquêtes, recommandations, infolettres, fiches pratiques, colloques etc. ) sont désormais réunies sur le nouveau site  www.ofis-france.fr .

Parmi les documents récents :

AIDE À LA DÉSIGNATION ET À LA PRISE DE FONCTION DES RÉFÉRENTS À L'INTÉGRITE SCIENTIFIQUE

 

Le Mémo d’aide à la désignation d’un référent à l’intégrité scientifique : les informations et conseils importants à connaître tant pour les opérateurs de recherche que pour les référents et référentes qui prennent leur fonction.

Profils des référentes et référents à l'intégrité scientifique en France

L’enquête : « qui sont les référents à l’intégrité scientifique en France ? »

Quelque 5 ans après les premières nominations de référent à l’intégrité scientifique, l’Ofis a souhaité mieux connaitre les profils de ces acteurs centraux de l’intégrité scientifique.

Prestation Serment Academie Ofis

Premiers témoignages de prestation du serment doctoral d’intégrité scientifique

Le 13 décembre 2022, l’Ofis et l’Académie des sciences ont invité cinq docteurs et docteures, ayant prêté volontairement le serment d’intégrité scientifique, à partager leur expérience et leurs motivations.

Contact

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Hélène Le Meur, responsable de l’infolettre